Ce qu'il faut retenir :
- La caféine est un des excitants les plus anciens et les plus connus au monde.
- À doses modérées, la caféine agit rapidement et positivement sur notre organisme.
- Coup de boost plus ou moins rapide, source d’addiction, voire d’anxiété, nous réagissons tous différemment à la prise de caféine.
« Le café arrive, cette liqueur grave et saine, qui guérit l’estomac, rend le génie plus vif et ragaillardit les esprits sans rendre forcené » (source anonyme, 1674)
Appelez-la théine, guaranine, matéine ou caféine : il s’agit bien de la même molécule, une poudre blanche amère, découverte en 1819, en tant que composé du café, par le chimiste allemand Friedlieb Ferdinand Runge. Deux siècles plus tard, nous ne consommons pas moins de 120 000 tonnes par an (1) de café, offrant à la caféine la première place du podium des molécules nootropiques ou psychoactives (2). Entre attraction et désamour, faisons plus ample connaissance avec dame caféine.
Premier point : nous ne sommes pas tous égaux face à la caféine
« Un Japonais non-fumeur buvant son café avec une boisson alcoolisée sentirait les effets de la caféine cinq fois plus longtemps qu'une femme anglaise fumeuse, mais n'ayant pas bu et ne prenant pas la pilule » (The World of Caffeine (3)). Face à la caféine, nous avons tous notre propre sensibilité. Cette variabilité est liée au génotype et à l’état physiologique de chacun, mais également aux co-expositions possibles telles que le tabagisme, l’alcool ou la prise de médicaments. De façon générale, les femmes métaboliseraient plus rapidement la caféine que les hommes, et les fumeurs deux fois plus vite que les non-fumeurs (4). A l’inverse, chez les non-fumeurs, les hommes, les femmes sous pilule (contraceptive) et la population asiatique, la molécule resterait plus longtemps dans leur organisme. Difficile donc de prédire l’action de la caféine sur nos performances physiques et intellectuelles, ni sur notre endormissement sans confronter notre corps à la consommation de caféine !
Deuxième point : “un coup de boost” plus ou moins rapides
Une fois ingérée, la caféine est absorbée au niveau de l’estomac et de l’intestin grêle pour être ensuite distribuée dans tout l’organisme (5) où elle active des récepteurs cérébraux qui stimulent notre système nerveux. Plus précisément, la caféine a un effet désinhibiteur de l’activité cérébrale provoquant la libération d’adrénaline et de dopamine. Son niveau sanguin le plus haut est atteint au bout de 30 à 60 minutes (6) (parfois l’effet est ressenti après 10 petites minutes (7)). Comme on le disait un peu plus haut, cela varie d’un individu à un autre. Ensuite, l’organisme élimine la moitié de la caféine sous 3 à 5 heures (on parle de demi-vie de la caféine), l’autre partie pouvant subsister jusqu’à 14 heures après la prise. En outre, sa biodisponibilité est fortement influencée par la galénique. Illustration avec les chewing-gums dits énergisants (comprendre contenant de la caféine) dont raffolent certains footballeurs professionnels. Pourquoi ? Le coup de fouet recherché serait quasi instantané, l’absorption au niveau de la cavité buccale étant plus rapide.
Troisième point : la caféine est partout
La caféine ne résume pas aux grains de café ! Elle est naturellement présente dans les feuilles, les graines et/ou les fruits de près de 60 plantes (café, thé, kola, guarana, maté, cacao, maca...). Tiens, des plantes que l’on retrouve souvent dans des formules pour le tonus ! En outre, elle peut entrer dans la composition de boissons énergisantes et sodas qu’elle soit naturelle ou synthétique. Et à chaque préparation, sa dose :
- Dans 250 ml de café filtre, il y a 175 mg de caféine ;
- Dans 50 ml d’expresso : 100 mg ;
- Dans 250 ml de boisson énergisante : 80 mg ;
- Dans 250 ml de chocolat chaud, il y a 63 mg de caféine ;
- Dans 250 ml de thé (vert comme noir) : 42 mg ;
- Dans 250 ml de soda : 32 mg ;
- Dans 250 ml de déca : 6 mg (et oui…).
Quatrième point : en quantité raisonnable, c’est même bon pour la santé !
Et ce n’est pas nouveau ! Dès le Paléolithique, les premiers peuples auraient découvert que mâcher certaines graines, écorces ou racines diminuait provisoirement la fatigue, stimulant la vigilance et améliorant l’humeur (8). C’est bien plus tard qu’il a été constaté que cet effet était potentialisé en immergeant certains composés végétaux dans l’eau chaude. Aujourd’hui, il est admis que la caféine est un stimulant. À ce titre, elle entraînerait une accélération du rythme cardiaque et une vasodilatation au niveau cardiovasculaire. D’un point de vue respiratoire, son action de dilatation faciliterait la respiration, et quant à la digestion, le transit serait facilité, et le fonctionnement des reins amélioré par son effet diurétique. Enfin, psychostimulante, la caféine améliorerait les capacités cognitives (mémoire, concentration et apprentissage) et agirait positivement sur l’humeur via la dopamine. Agir vite et bien, tel est le credo de la caféine, mais son secret ne serait-il pas aussi dans la modération ?
Cinquième point : pas anodine pour autant
Comme pour tout élément, c’est la dose qui fait le poison. Les autorités ont alerté à plusieurs reprises sur les effets indésirables provoqués par une surconsommation de caféine, ou de mauvaises associations (par exemple avec de l’alcool) (9). L’EFSA recommande ainsi 200 mg par jour pour la population générale ainsi que pour les femmes enceintes, les enfants et les adolescents. En France, 30 % des adultes et 1 à 2 % des enfants seraient en consommation excessive. Le risque ? La caféine peut entretenir un état d’anxiété… Plus surprenant, 11 % des 3-10 ans et 7 % des 11-14 ans pourraient être considérés comme potentiellement dépendants (9) à la caféine (via leur consommation de sodas par exemple). Les plus jeunes seraient davantage susceptibles d’addiction à la caféine du fait de l’immaturité de leur néocortex au niveau cérébral. Néanmoins, le bon côté de la médaille c’est que si dépendance ou accoutumance il y a, un sevrage reste possible en quelques jours (toujours grâce à leur immaturité neurologique), le temps que les récepteurs cérébraux retrouvent leur équilibre.
La caféine est donc bien présente dans nos vies au quotidien. Et même sans aimer le café, on peut être confronté à ses effets, ou en bénéficier, en consommant thé, chocolat et autres sodas. Son action stimulante rapide peut nous motiver à la rechercher pour booster nos matins difficiles, mais l’idéal est de ne pas dépasser une certaine dose : celle qui nous correspond ! Pour un coup de fouet longue durée sur la journée, des plantes présentent d’autres molécules intéressantes. C’est le cas, par exemple, du ginseng avec ses ginsénosides stimulants. Plante emblématique de la pharmacopée asiatique (l’Ayurvéda), le ginseng est un ingrédient de référence pour ses bienfaits énergisants. Chez Nutri&Co, nous avons bien planché sur la question. Pour en savoir plus, par ici .
Références
(1) What’s your poison: caffeine. Geoffrey Burchfield, Australian Broadcasting Corporation, 1997
(2) Decaffeinated coffee is not caffeine-free, experts say. University of Florida, ScienceDaily
(3) The World of Caffeine: The Science and Culture of the World’s Most Popular Drug, Bennett Alan Weinberg & Bonnie K. Bealer
(4) The coffee junkie’s guide to caffeine addiction. Mark Adams, New York Magazine, 2008
(5) Absorption and subjective effects of caffeine from coffee, cola and capsules. A. Liguori and coll. Pharmacol Biochem Behav, 1997
(6) Académie américaine de Médecine du Sommeil
(7) Caffeine Has Greater Effect On Men, And Starts Only Ten Minutes After Consumption, 2008
(8) A Brief History of Drugs : From the Stone Age to the Stoned Age. Antonio Escohotado et Ken Symington. Park Street Press, 1999
(9) site de l’ANSES : https://www.anses.fr/fr/content/caféine-et-santé