Ce qu'il faut retenir :
- Les nootropiques agissent naturellement et sans effets secondaires pour booster le cerveau et lutter contre le stress chronique.
- En consommer ne rend pas plus intelligent (dommage !) mais peut aider à se sentir mieux au quotidien.
- Vous connaissez déjà le plus fameux des nootropiques naturels : la caféine.
A l’instar de la tarte des sœurs Tatin, les nootropiques auraient été découverts comme par accident. Le psychologue et chimiste roumain Corneliu Giurgea et son équipe cherchaient dans les années 60 à mettre au point un neurotransmetteur capable de traverser la barrière hémato-encéphalique pour faire dormir. La molécule en question est arrivée à bon port au cerveau, mais n’a pas eu l’effet somnifère recherché. Et c’est ainsi que le piracétam (de son nom de marque Nootropil®) (1) est né, et avec lui une nouvelle classification de molécules : « l’approche nootropique de l’activité intégrative de l’esprit » (2), ainsi qu’un nouveau concept, celui des nootropiques (3) qui augmentent les capacités de vigilance et de concentration. Si la chimie médicinale vient ainsi de découvrir les nootropiques, la Nutra les connaît depuis très longtemps.
Nootropiques : Kezako ?
Étymologiquement, nootropique vient du grec « psyché, esprit » et « tour, orientation, direction ». Il caractérise des substances naturelles ou synthétiques visant à améliorer les fonctions cognitives et les fonctions d’apprentissage, en boostant le cerveau et en assurant sa protection contre le stress chronique. Les informations lui sont alors mieux transmises et ce, sans effets secondaires. Dopage cognitif (4), smart-drugs (5), drogues intelligentes, plantes adaptogènes, etc., … autant de dénominations qui existent aujourd’hui pour désigner les nootropiques. Ces derniers peuvent être regroupés en trois catégories :
- les racétams, médicaments psychotropes dont le fameux piracétam,
- les stimulants, qui activent l’activité du système nerveux central comme la caféine ou la nicotine,
- et bien-sûr les nutraceutiques de type extraits de plantes ou acides aminés.
Leurs cibles sont multiples : mémoire, concentration, cognition, sommeil, humeur et anxiété, et il est assez courant qu’un nootropique agisse sur plusieurs d’entre elles.
Les nootropiques empruntent différents mécanismes d’action tels que la circulation sanguine au niveau cérébral, la régulation de neurotransmetteurs impliqués dans l’influx nerveux, la protection des neurones contre l’oxydation et le vieillissement cellulaire, l’anti-inflammation du cerveau et la régénération nerveuse pour limiter la perte neuronale. Aussi, afin de potentialiser et d’augmenter leurs effets, les nootropiques sont de plus en plus combinés au sein d’un même produit ; il s’agit de « stacking » ou de « pack nootropiques ».
On les connaissait avant de les nommer
Parmi les plus populaires, il y a la caféine, nootropique ou nootrope naturel qu’il est préférable d’utiliser le matin afin d’éviter que l’effet souhaité (attention et concentration) ne devienne négatif sur une autre de ses cibles : le sommeil.
Quant au plus ancien des nootropiques naturels, c’est certainement le ginseng (Panax ginseng), utilisé depuis plus de 4 000 ans dans la médecine traditionnelle asiatique pour ses effets toniques et aphrodisiaques. Ses vertus auraient été décrites dans l’un des plus anciens livres de l’Histoire, l’œuvre chinoise le Pen-ts’ao (6), datée à 2 800 ans avant J. C. pour les Chinois, et au début de notre ère plus généralement. L’origine de « Panax » (7) (ou « panacée » en français) signifie d’ailleurs « remède universel », rien que ça !
Ceci explique sûrement l’engouement des études mentionnant « ginseng » recensées sur la plateforme PubMed depuis 1970 : plus de 10 000 publications ! Le ginseng et ses effets sur la santé humaine, auraient même été à l’origine de l’invention du terme « adaptogène » par le toxicologue russe Nicolaï Lazarev en 1940, pour définir et classifier le champ d’action de ces plantes : renforcement de l’homéostasie et vitalité.
Petite sœur du ginseng dans la famille des plantes adaptogènes, Rhodolia rosea est de plus en plus documentée pour ses effets positifs sur la mémoire ou l’attention (8) et négatifs sur l’anxiété (9). Traditionnellement, cette plante était utilisée pour traiter l’asthénie (10) (fatigue chronique). Prisé des étudiants en période d’examen : le Ginkgo biloba est également considéré comme un nootropique naturel, dont la supplémentation accroîtrait les capacités de mémorisation et de concentration (11).
Les super-héros du quotidien
La L-tyrosine est un acide aminé qu’on retrouve aisément dans les céréales, les légumineuses, les noix et graines, les fruits et légumes, la volaille et les œufs. Il s’agit d’un précurseur de la dopamine et de la noradrénaline, et permet de réguler les émotions. En période de stress, l’organisme surconsomme la dopamine et donc la tyrosine, d’où un besoin accru de cet élément pour rétablir un équilibre (émotionnel) (12). Autre précurseur mais cette fois de la sérotonine, le tryptophane (lait, viande, poisson, œufs, fruits oléagineux et légumes secs), est intimement lié à la bonne humeur par son intervention dans les boucles de régulation relatives à l’état dépressif (13). D’autres substances nootropiques sont bien connues, pour ne pas dire de notre quotidien, l’œuf pour sa teneur en choline, le thé vert et sa L-théanine et les poissons gras et leurs oméga-3.
Les nootropiques sont donc bien présents naturellement, à différentes doses selon l’efficacité souhaitée, dans notre alimentation, ainsi que dans l’offre grandissante des nutraceutiques en la matière. Ils peuvent ainsi accompagner toutes les étapes qui rythment une journée : pour bien la démarrer et assurer intellectuellement, pour se protéger des troubles comportementaux et psychiques liés au stress du quotidien, et pour bien récupérer grâce à un sommeil réparateur. Bien les connaître, ces nootropiques, et bien SE connaître, là est peut-être la clé pour s’assurer de passer une bonne journée !
Références
(1) Prescrit pour le traitement d'appoint de troubles mineurs chroniques (cognitifs ou neurosensoriels) liés au vieillissement (à l'exclusion de la maladie d'Alzheimer et des autres démences)
(2) C. Giurgea, Pharmacology of integrative activity of the brain. Attempt at nootropic concept in psychopharmacology. Actual Pharmacol, 1972
(3) C. Giurgea, The nootropic concept and its prospective implications. Drug Development Research, 1982
(4) S. Orsec, Nootropiques-Comment booster son cerveau. MaleAlpha.fr, 2017
(5) S. Rose, How smart are smart drugs? The Lancet, 2008
(6) Répertoriant 365 substances bénéfiques pour l’homme
(7) Du grec ‘pan’ qui veut dire « tout » et ‘akos’ pour « remède »
(8) G-P Ma and coll. Rhodiola rosea L. improves learning and memory function : preclinical evidence and possible mechanisms. Frontiers in Pharmacology, 2018
(9) J. D. Amsterdam and coll. Rhodiola rosea L. as a putative botanical antidepressant. Phytomedecine, 2016
(10) A. Panossian and coll. Rosenroot (Rhodiola rosea) : traditional use, chemical composition, pharmacology and clinical efficacy. Phytomedicine, 2010
(11) J. A. Mix and coll. An examination of the efficacy of Ginkgo biloba extract EGb761 on the neuropsychologic functioning of cognitively intact older adults. The Journal of Alternative and Complementary Medecine, 2000
(12) Colzato and coll. 2007, 2014, 2017
(13) Castanon and coll. 2015