Ce qu'il faut retenir :
- Un débat sans-merci sur la spiruline enflamme la toile française, entre les partisans du BIO et les artisans français qui défendent leur savoir-faire.
- Personne ne semble bien comprendre les tenants et aboutissants de ce débat devenu idéologique.
- Or, il s’agit avant tout d’un cas d’école de choix réglementaires qui fait forcément des heureux et des malheureux.
Spiruline Biologique. Maintenant qu’on a mis la moitié de la France en PLS, alors que l’autre moitié se dit “bah ouais et alors ?”, prenons le temps de revenir sur ce débat qui déchire les amateurs de cette microalgue si précieuse. La spiruline Bio est-elle un non-sens total? Ou une évidence absolue ? Pour trancher, revenons aux fondamentaux : c’est quoi le Bio? Et c’est quoi la spiruline ? Et surtout : qui veut la peau des spiruliniers français ?
Back to Basics : c’est quoi le Bio ?
Dans les années 1980, la consommation de masse explose, et la demande pour une alimentation “clean” suit la cadence. Normal, les consommateurs sont désormais sensibilisés à l’impact de l’Homme sur l’environnement. Et ce nouveau marché est dopé par les premiers relevés de la pollution des sols, de l’eau et de l’air. C’est dans ce contexte que le label AB, “Agriculture Biologique”, naît en France en 1985. Son objectif ? Devenir une norme pour le consommateur, garantie d’un produit propre, notamment sans chimie, reconnue comme étant nocive pour l’aliment, l'agriculteur et l’environnement (1).
On parle donc de produits agricoles et alimentaires, deux conditions Sine qua non pour le label “Agriculture biologique”. Une évidence. En effet, on n’imagine pas parler de chemise BIO, même si le coton peut être BIO. De même, ne cherchez pas un label AB sur un saumon sauvage pêché dans le pacifique et non-agricole par définition...
Depuis, d’autres labels spécifiques ont été créés pour répondre à la demande de produits non-alimentaires et “clean”, comme les cosmétiques (Cosmebio, Cosmétique Ecologique…). Business is Business…
Un label Européen
En 2009, le label Bio européen engloutit l’ensemble des labels locaux et normalise les cahiers des charges à l’échelle du continent.
Aujourd’hui, si vous achetez un produit BIO en France, avec la petite feuille verte, alors votre produit répond au cahier des charges de la norme européenne. Quel que soit son lieu de production, il est validé par vos normes locales.
Et la Spiruline dans tout ça ?
La spiruline est une cyanobactérie d’eau saumâtre, ni douce ni salée, du genre Arthrospira (2), des bactéries microscopiques et photosynthétiques de couleur bleu-vert. Elle a besoin de soleil, de minéraux et d’oligo-éléments pour se reproduire (potassium, sodium, magnésium, fer, phosphore, azote...). Les cyanobactéries sont très souvent décrites comme des algues car elles ressemblent à ces dernières (3,4). On y est : Algue et BIO on comprend, surtout si on parle d’aquaculture. Cyanobactérie et BIO... C’est déjà moins évident.
Il est temps d’appeler Pascal Praud et de se retrousser les manches, le débat est lancé.
Je veux mon label AB moi aussi !
Depuis le 7 mai 2017, la spiruline est entrée dans le champ d’application du règlement européen UE Règlement (CE) 889/2008 relatif à l’agriculture biologique, et elle est assimilée aux algues marines. La question est donc tranchée : si ontologiquement la spiruline est une cyanobactérie, pour la réglementation, c’est une algue. La porte d’une labellisation est grande ouverte.
Et celle du conflit avec les spiruliniers français aussi. En effet ces derniers travaillaient sur un cahier des charges spécifique à la Spiruline, conçu pour s’adapter aux… cyanobactéries (5).
Mais l’organisme roi du BIO a fait son choix, et pour avoir le fameux sésame AB, il faudra désormais cultiver la spiruline en suivant un cahier des charges précis (aquaculture), avec notamment des intrants BIO. Les spiruliniers français sont distancés dans la course à la certification chérie des consommateurs, ils crient au scandale et à la conspiration.
Pourquoi est-ce si compliqué ?
En effet, les intrants BIO, notamment ceux qui apportent l’azote ne courent pas les rues, et rendent la production de spiruline autrement plus complexe. Voilà pourquoi les spirulines BIO de qualité sont si rares sur le marché. Il faut tout un système dédié de production d’intrants azotés BIO, et ceux qui en ont développé un l’ont naturellement breveté pour se protéger et garder l’exclusivité.
Beaucoup ont tenté, même en France, avec des investissements conséquents, et très peu y sont arrivés. N'oublions pas qu’un intrant de mauvaise qualité, même s’il est BIO, est synonyme de spiruline de mauvaise qualité, et ce marché de connaisseurs n’est pas dupe…
Le choix de l’équipe
Sans rentrer dans un débat caricatural, on sait tous qu’il existe des très bonnes spirulines artisanales françaises, même sans le fameux label, tout comme il existe de très bonnes spiruline BIO produites à l’étranger.
Nous avons fait le choix de Parry Nutraceuticals (en Inde) qui récupère l’azote via la fermentation anaérobie de déchets organiques pour fabriquer ses propres intrants BIO car sa démarche nous a semblé convaincante.
Quant aux autres critères qualitatifs, qui restent centraux, vous les connaissez désormais par cœur :
- Séchage à froid,
- Taux de phycocyanine,
- Contrôle des métaux lourds, des pesticides et des microcystines,
- Taux de protéines,
- Pas de silice dans les comprimés.
Publications
(1) https://agriculture.gouv.fr/sites/default/files/documents/pdf/PJ3-Nvx_R_CE_889-2008_cle41a61d.pdf
(2) O Ciferri “Spirulina, the edible microorganism.”Microbiol Rev. 1983 Dec; 47(4): 551–578. PMCID: PMC283708 PMID: 6420655
(3) https://www.ncbi.nlm.nih.gov/mesh?Db=mesh&Cmd=DetailsSearch&Term=%22Cyanobacteria%22%5BMeSH+Terms%5D
(4) https://www.ncbi.nlm.nih.gov/Taxonomy/Browser/wwwtax.cgi?id=1117
(5) https://www.spiruliniersdefrance.fr/spiruline-bio/