Ce qu'il faut retenir :
- Les probiotiques sont des bactéries amies bénéfiques à notre santé.
- On les retrouve en gélules, mais aussi dans certains aliments, comme le yaourt ou les produits fermentés.
- Même s’ils restent intéressants, ces apports via l’alimentation restent limités en quantité et en variété.
Depuis qu’on a découvert qu’il y avait tout un écosystème de microorganismes bénéfiques qui squatte nos intestins (le fameux microbiote), et qu’il fallait plutôt le soigner pour rester en forme (1), tout le monde y va de son petit conseil : « mange du yaourt », « non ! des fibres », « prend des probiotiques », « perso, je prends du kimchi tous les matins ». Toutes ces astuces ont pour but de « booster » votre microbiote, c’est-à-dire de favoriser sa croissance et sa diversité. Si les probiotiques trônent tout en haut de la pyramide alimentaire du marché Nutraceutique (probablement 1er ex-aequo avec le magnésium), certains remettent en cause leur utilité et militent pour un apport de ferments via l’alimentation. Mais est-ce vraiment pareil ? Autrement dit, retrouve-t-on les mêmes bactéries bénéfiques dans certains aliments que dans nos gélules ?
Des probiotiques dans les aliments : depuis la nuit des temps
Quand on parle de probiotiques, on parle de façon assez générique de Bifidobacterium, Lactobacillus et Saccharomyces. Les deux premiers appartiennent au règne des bactéries, alors que Saccharomyces est une levure. C’est au Moyen-Orient en 10 000 avant J-C que les aliments contenant des probiotiques firent leur première apparition dans du lait qui aurait fermenté par accident. Au contact de sacoches en peau d’animal et dans un environnement assez chaud, le lait se serait miraculeusement transformé en yaourt (2). Ce procédé découvert par accident sera alors maîtrisé et institutionnalisé comme méthode de conservation des aliments (3).
Probiotiques = fermentation
Il existe aujourd’hui deux principaux types de fermentation, encore utilisés par l’industrie agroalimentaire, et qui se font tous deux en anaérobie, autrement dit dans un milieu privé d’oxygène :
- La fermentation alcoolique : le sucre est transformé en alcool par des levures (4). C’est grâce à cette fermentation que l’on peut se rafraîchir avec une bonne bière ou déguster un bon verre de vin.
- La fermentation lactique (ou lacto-fermentation) : Les aliments macèrent en présence de bactéries (Lactobacilles, Bifidobactéries, Streptocoques, Lactocoques ou « ferments lactiques ») qui vont transformer les sucres en acide lactique pour se développer (5). La choucroute, les pickles, le pain au levain, le fromage ou encore le yaourt sont obtenus via ce type de fermentation.
Les aliments riches en probiotiques naturels
Mais si certains aliments contiennent des probiotiques naturels et que nous sommes encouragés à en consommer, par où commencer ?
- Le yaourt est produit à partir de lait auquel on ajoute des ferments lactiques. En France, pour avoir l’appellation yaourt, il est nécessaire d’utiliser deux types de bactéries : Lactobacillus bulgaricus et Streptococcus thermophilus. Au-delà du yaourt, les fromages sont aussi issus de multiples fermentations et contiennent des probiotiques.
- L’utilisation du kéfir remonte aussi à l’antiquité. Il nous vient tout droit des régions du Caucase et du Tibet. Il s’agit d’une boisson issue de la fermentation du lait à partir de graines de kéfir. Ces graines sont en réalité un agrégat symbiotique de levures et de bactéries (6, 7). Le goût de la boisson obtenue est comparable à celui du yaourt : légèrement aigre et crémeux. Il existe deux types de kéfir, un avec du lait et un autre avec des fruits et de l’eau enrichie en sucre.
- Le kombucha provient lui aussi d’Asie et il est issu de l’activité d’une alliance entre bactéries et levures. Ces dernières fermentent dans une préparation à base de thé (8) pour produire une boisson un petit peu aigre mais pétillante.
- Le chou fermenté est tout simplement du chou émincé conservé dans de l’eau salée. Le chou contient naturellement des bactéries lactiques permettant la fermentation. Son alter-ego, le kimchi, est quant à lui, un plat qui provient de Corée. Il est préparé comme le chou fermenté avec en prime un ajout de piment et d’épices (9).
Et la liste pourrait se poursuivre : pain au levain, miso, tempeh, cornichons, olives, carottes, etc.
Notez qu’à l’exception du kéfir qui est composé de bactéries lactiques, acétiques et de levures (10), tous ces aliments fermentés contiennent un seul type de bactérie appartenant au genre Lactobacillus.
Et les gélules dans tout ça ?
Mais si on est prêt à manger des aliments fermentés matin, midi et soir, alors pourquoi donc en prendre en gélules ? Eh bien la réponse est assez simple : les probiotiques en gélules sont plus adaptés lorsqu’on veut «maîtriser » ce qu’on fait. En effet, avec les aliments fermentés, impossible de savoir « combien » de probiotiques on consomme (même s’il n’existe pratiquement aucun risque de surdosage, sauf peut-être avec la choucroute, pour diverses raisons), et surtout, la variété des souches consommées est limitée. En effet, à l’exception du kéfir qui est composé de bactéries lactiques, acétiques et de levures (10), tous les aliments fermentés mentionnés ci-dessus contiennent un seul type de bactérie appartenant au genre Lactobacillus.
Avec des gélules, si elles sont bien conçues, vous pouvez vous assurez d’un apport de souches variées, étudiées cliniquement, et dans des quantités suffisantes, ce qui est fondamentalement différent. D’ailleurs, cet apport « maîtrisé » n’empêche pas de consommer de la choucroute par ailleurs. Ah, qu’est-ce qu’on ne ferait pas pour notre microbiote…
Références
1. Microbiote intestinal (flore intestinale) dossier de l’Inserm (2016), lien URL : https://www.inserm.fr/information-en-sante/dossiers-information/microbiote-intestinal-flore-intestinale.
2. M Ozen, E C Dinleyici, The history of probiotics: the untold story, Benef Microbes. 2015;6(2):159-65.
3. Shiferaw Terefe, Food Fermentation: Netsanet Shiferaw Terefe, CSIRO Food and Nutrition, Australie, 2016.
4. Sofia Dashko, Nerve Zhou, Concetta Compagno, and al. Why, when, and how did yeast evolve alcoholic fermentation? FEMS Yeast Res . 2014 Sep;14(6):826-32.
5. Maria Jose Saez-Lara, Carolina Gomez-Llorente, Julio Plaza-Diaz and al. The role of probiotic lactic acid bacteria and bifidobacteria in the prevention and treatment of inflammatory bowel disease and other related diseases: a systematic review of randomized human clinical trials. Biomed Res Int. 2015;2015:505878.
6. Damiana D Rosa, Manoela M S Dias, Łukasz M Grześkowiak. Milk kefir: nutritional, microbiological and health benefits. Nutr Res Rev. 2017 Jun;30(1):82-96.
7. Analy Machado de Oliveira Leite,1 Marco Antonio Lemos Miguel,2 Raquel Silva Peixoto and al. Microbiological, technological and therapeutic properties of kefir: a natural probiotic beverage. Braz J Microbiol. 2013; 44(2): 341–349.
8. Silvia Alejandra Villarreal-Soto, Sandra Beaufort, Jalloul Bouajila and al. Understanding Kombucha Tea Fermentation: A Review. J Food Sci. 2018 Mar;83(3):580-588.
9. Kun-Young Park 1 , Ji-Kang Jeong, Young-Eun Lee. Health benefits of kimchi (Korean fermented vegetables) as a probiotic food. J Med Food. 2014 Jan;17(1):6-20.
10. Maria R. Prado, Lina Marcela Blandón, Luciana P. S. Vandenberghe. Milk kefir: composition, microbial cultures, biological activities, and related products.Front Microbiol. 2015; 6: 1177.